Obs de l'A 19.11.1015François Vié

L’Observateur de l’Arrageois – 19 novembre 2015

1 – La région Nord-Pas-de-Calais est au cœur de l’Europe. Quels échanges avons-nous avec nos voisins européens ?

30% de la richesse nationale et de nos emplois (4 millions d’emplois selon l’INSEE auxquels il faut ajouter les emplois induits) sont liés à nos exportations. Le Nord-Pas-de-Calais est la 4e région exportatrice française et 77% de ses exportations sont dirigées vers l’union européenne. Le commerce européen transite aussi beaucoup par notre région, d’où des flux importants de poids lourds et une forte activité de logistique. Certains préconisent des contrôles aux frontières. Freiner le commerce extérieur pénaliserait l’emploi. Avoir des files de camions aux frontières en attente de contrôles, serait de plus très coûteux pour l’économie.

2- La région Nord-Pas-de-Calais est la première région métropolitaine française bénéficiant de financements européens Comment sont utilisés ces crédits européens dans la Région ?

Près d’un tiers du budget européen finance la politique de cohésion économique sociale et territoriale, autrement appelée politique régionale. Elle consiste à aider les Etats et la région qui en ont le plus besoin pour renforcer leur productivité et leur cohésion sociale. La région Nord Pas-de-Calais en bénéficie largement : de 2014 à 2020 ce seront 1.2 milliards d’euros (pour la Picardie : 0.5 milliards) qui iront aux entreprises, centres de recherche, universités, associations, logements sociaux, hôpitaux. Ces dernières années ont été financés : le Louvre-Lens, le site des deux caps, le CNRS Nord-Pas-de-Calais, le réseau ferré régional, la rénovation thermique de 4500 logements, pôle emploi, de nombreuses entreprises. L’Europe prendra en charge 42% du financement du canal Seine-Nord et aidera à la modernisation du port de Calais.

3- La Région Nord Pas-de-Calais a ouvert son bureau à Bruxelles en 1989 au cœur du quartier européen pour défendre les intérêts régionaux. Est-ce bien utile pour la région d’avoir un bureau à Bruxelles ?

Ce ne sont pas quelques bureaux à Bruxelles qui grèvent le budget de la Région. Par contre, il est important de disposer d’une cellule qui suit les évolutions réglementaires européennes, qui apporte un appui technique pour répondre aux appels d’offre de la Commission européenne et pour accéder aux financements européens. L’Europe reconnait les spécificités régionales et y adapte ses politiques. Il est normal que la région Nord Pas-de-Calais défende les intérêts de la région en faisant du lobbying.

4- La Région Nord-Pas de Calais s’inscrit dans une dynamique de coopération transfrontalière. Historiquement, le Nord Pas-de-Calais a développé des relations privilégiées avec les trois régions voisines : Wallonie, Flandre et Kent. Quel est l’intérêt de cette coopération ?

La région gère plusieurs projets réunissant ces quatre régions ou des territoires plus vastes, qui sont financés à hauteur de plus de 1 milliard d’euros de crédits FEDER pour 2014-2020 Ils visent à trouver des solutions communes à des problèmes communs entre collectivités ou autorités territoriales relevant de deux ou plusieurs États. La plupart de ces projets visent l’innovation et la protection de l’environnement, comme par exemple le Projet NOSTRA qui vise à préserver la biodiversité et le patrimoine naturel sur le détroit de la manche.

5 – Calais est l’illustration dramatique de la crise de l’immigration. Ne vaudrait-il pas mieux fermer les frontières pour résoudre ce problème une bonne fois pour toutes ?

Calais est un goulot d’étranglement pour les immigrés qui cherchent à rejoindre le Royaume-Uni  et qui donc s’y accumulent créant un problème humanitaire grave. Il s’agit pour l’essentiel, non pas de demandeurs d’asile ou de réfugiés, mais de migrants économiques. En réalité il n’y a pas d’immigration massive en France. La proportion d’immigrés en France est de 6 % et elle est stable depuis des années. Depuis 1982, la part d’immigrés dans la population a augmenté seulement de 1,2 %, celle des étrangers a diminué de 0,5 % (source INED) La France est peu attractive pour les immigrés économiques autant que pour les demandeurs d’asile, qui lorsqu’ils entrent en France, recherchent une autre terre d’accueil. Il n’y a qu’à interroger les réfugiés de la Jungle de Calais pour s’en persuader. De toutes manières, il est illusoire de fermer les frontières à des personnes qui fuient la famine ou des dangers mortels, comme le montrent les risques qu’elles prennent pour venir jusqu’à nous. La crise aigüe que nous connaissons ne trouvera sa solution que dans l’apaisement des conflits qui provoquent l’exode et le développement des pays pauvres. C’est ensemble que les Européens doivent trouver les solutions: contrôle des frontières européennes, répartition des efforts d’accueil, mise en place de politiques communes d’immigration et d’asile. A plus long terme, il nous faudra avoir une politique européenne plus forte d’aide au développement, une diplomatie et une défense commune pour aider à la paix dans le monde.

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