2016 La Voix du Nord http://www.lavoixdunord.fr/region/francois-vie-president-du-mouvement-europeen-du-ia29b0n3593132
L’Arrageois François Vié est le président de l’antenne Pas-de-Calais du Mouvement Européen. Nous l’avons interrogé sur les raisons et les conséquences du Brexit.
– Votre sentiment sur ce coup de tonnerre ?
« Tristesse et inquiétude. L’UE est un exercice unique au monde de rapprochement pacifique des peuples, pour faire face à des défis auxquels les États ne peuvent plus répondre seuls. Soixante-dix ans de patiente construction ne doivent pas être mis en cause par le départ du Royaume-Uni ».
– Quelles en sont les raisons ?
« Le vote s’est joué sur l’immigration. Pas au sujet des réfugiés ou des extra-européens, mais de l’installation en Grande-Bretagne de citoyens de l’UE. Les Britanniques désavouent ainsi l’ambition généreuse et humaniste de créer un espace de vie en commun pour les habitants du continent (…) C’est aussi le résultat de manœuvres politiciennes. David Cameron a promis un référendum pour apaiser les tensions internes à son parti, et comme pour tous les référendums, celui-ci a donné une prime à l’émotionnel au détriment d’une réflexion apaisée sur les enjeux de long terme. Il faut encore mettre en cause la dérive intergouvernementale qui fragilise l’UE, où le pouvoir est passé progressivement des institutions aux chefs d’États et de gouvernements. Ceux-ci, plutôt que de penser l’intérêt collectif, défendent leurs intérêts nationaux. »
– Quelles seront les conséquences ?
« Pour les Britanniques, le réveil sera douloureux. Plus de 75 %, 58 %, 55 % des électeurs, respectivement de Londres, d’Écosse et d’Irlande du Nord, ont voté pour rester dans l’UE. Le pays est divisé et risque l’éclatement. Pour l’UE, le Brexit est aussi bien une remise en cause qu’une clarification. Les Britanniques étaient déjà à moitié hors de l’Union. Absents de l’euro, de l’espace Shengen, de la coopération policière et judiciaire, ils freinaient tout. Leur départ lèvera un obstacle aux progrès de certaines politiques communes. Mais les autres membres doivent réagir rapidement pour éviter un effet de contagion. Il faut redonner confiance dans le projet d’une Europe unie, contrer l’impression d’une Europe inefficace en lui donnant des missions et des moyens sur les questions concrètes et urgentes : contrôle des frontières et politiques migratoires communes, relance d’une défense européenne, investissement dans la transition énergétique, lutte pour l’harmonisation fiscale et contre l’évasion.. . Il faut aussi et surtout mettre en chantier une Europe politique. »
– Et sur l’économie régionale ?
« Le Royaume-Uni n’est que le 3e client (7 % des exportations) et le 6e fournisseur du Nord – Pas-de-Calais. Il n’y aura pas d’incidence immédiate pour les entreprises de la région, dans la mesure où les relations commerciales ne seront pas coupées du jour au lendemain. Par contre, le Brexit crée des incertitudes pour plusieurs années, le temps que de nouvelles relations économiques se redéfinissent. Cette incertitude peut dissuader des investisseurs internationaux de créer des projets en Europe et donc dans la région. »
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